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7 juin 2005

Le Contrefactuel

         

Le "contrefactuel" ou "ce qui aurait pu se produire, mais ne l'a pas fait" a-t-il des conséquences objectives dans la réalité? En physique classique le contrefactuel n'existe simplement pas, en philosophie classique non plus. En physique quantique, si. Le raisonnement ci-dessous va porter sur l'interféromètre de Mach Zender:

(1) - Voici (dessin à main levée) le dispositif (figure 1). Il comporte quatre miroirs, dont deux sont "semi réfléchissants".

mzender1

Les lames semi transparentes (ou semi réfléchissantes) ne sont pas des objets bien rares ni compliqués, on en trouve partout. Placées en A et D, elles sont sur le dessin présentées en jaune. Les miroirs (totalement) réfléchissants sont (ici) bleus. A gauche, une source de lumière (de photons) "cohérente". Un laser fait bien l'affaire. La lumière se divise en deux sur la lame A, il y a ensuite deux chemins, l'un marqué en rouge, ACD, l'autre marqué en bleu, ABD. Les deux convergent sur la dernière lame D, qui devrait, comme la lame A, être traversée par la moitié de la lumière et transmettre l'autre, d'où qu'elle vienne. En fait, la lumière qui a suivi le chemin rouge ACD traverse toujours, la lumière qui a suivi le chemin ABD est réfléchie toujours, le faisceau "entier" parvient, toujours, en "1" (on pourrait y disposer une plaque photographique ou une photocellule...)

(2) - On peut penser qu'il existe des "interférences" qui expliquent le comportement de la lumière sur la dernière lame semi transparente D. C'est d'ailleurs le cas et c'est pourquoi l'appareil s'appelle un "interféromètre". Mais...
Si l'on se munit (c'est un appareil lourd, compliqué, délicat) d'un projecteur qui expédie des photons "un par un", éventuellement toutes les 10 minutes, alors... alors on obtient exactement le même résultat. Si le photon a été réfléchi en A et suit le trajet rouge, il traverse toujours en D, mais s'il a traversé la lame A, et donc suivi le trajet bleu, il est réfléchi, toujours, en D, de sorte qu'il parvient, toujours, en "1"... Question: il interfère avec quoi, ce photon solitaire et orphelin?
       Réponses:
a - (classique) La lumière se comporte comme une onde, qui emplit tout l'espace, c'est cette onde (électromagnétique, équation de Maxwell) qui interfère.
b - (quantique) La lumière se comporte comme une (des) particule(s). Le photon, après la lame A, se trouve en deux états "superposés", un état ACD ET un état ABD. On calcule des "amplitudes de probabilité" (équation de Schrödinger) de trouver le photon en B ou en C lorsqu'on l'observe. Tant qu'on ne l'observe pas, il est présent à la fois en B et en C. C'est la "superposition quantique". Lorsqu'il parvient en D, la superposition cesse (interférence des amplitudes), il parcourt le trajet "1".
c - (quantique/Hugh Everett) Ce qui se produit, c'est qu'en réalité il y a superposition, non seulement de photons, mais de mondes entiers... il y a celui qui contient l'observateur et un photon qu'il appelle "réel", qui passe par un des trajets, et un photon qu'il appelle "virtuel" (qui, en fait, est aussi réel que le premier, mais dans un autre monde) et ces deux photons, réel et virtuel, interfèrent en D, de sorte que, quel que soit le trajet parcouru par le photon "réel", il aboutit toujours en "1".
Les deux premières réponses, classique et quantique, font appel à un mystérieux "dualisme onde-corpuscule". La troisième, celle des univers multiples ou du Multivers, propose une explication "compréhensible" et sans mystère, mais elle entraîne cette idée nouvelle: derrière le monde, "notre monde", il y a des milliards d 'autres "mondes parallèles". Tout ce qui est possible existe, ici ou ailleurs.

(3) - Restons maintenant dans le cas du photon envoyé "un par un".
       Nous plaçons un carton, ou n'importe quel écran, sur le trajet AB...
       Si le photon traverse A et suit le trajet bleu... il est arrêté, fin de l'histoire, il n'arrive nulle part (figure 2)...

mzender2

(3 ... suite) Si le photon est réfléchi en A, rien ne l'arrête, il peut poursuivre son chemin en ACD, puis aboutir en "1", pas de surprise, c'est comme avant... (figure 3).

mzender3
(4) Mais il y a plus curieux. Si le photon, comme dans le cas précédent, est réfléchi en A (cela arrive une fois sur deux), il suit le trajet ACD... comme avant, mais sur D il n'y a plus d'interférence (car rien ne vient de l'autre côté, à cause du carton), il peut donc aussi bien aboutir en "2" et ne s'en prive pas... (figure 4).

mzender4

C'est normal: mais, il y a tout de même une question qui se pose, pour un observateur "classique" qui va demander COMMENT le photon, qui est passé par ACD, peut-il SAVOIR qu'il y a un obstacle entre A et B et que donc, il PEUT se rendre en "2"? C'est vrai qu'il est tout seul, qu'il est indivisible et qu'il ne fait pas deux tours pour aller y voir...
       Pour Everett, c'est toujours une évidence: il ne vient aucun photon "virtuel" par l'autre chemin, puisqu'il est fermé.

(5) Et maintenant, place à l'expérience (d'Elitzur-Vaidman) démontrant l'existence du contrefactuel dans le monde tel qu'on l'observe. On suppose que l'on détient des bombes ultrasensibles, munies d'un petit miroir détonateur. Si un seul photon a le malheur d'arriver sur le miroir, la bombe explose. Dans le lot, il y a des bombes actives et des bombes défectueuses. Comment les trier? Si on essaie d'envoyer un photon dessus, les bombes actives explosent... ce n'est pas l'idéal, pour les mettre en lieu sûr efficacement. De fait, en physique "classique" il n'existe aucune solution à cette question. Que faire?
       Réponse: on dispose la bombe dans un interféromètre de Mach Zender, à la place du miroir B. (figure 5)

Une bombe défectueuse se comportera comme un miroir banal. Une bombe efficace se comportera comme un écran: c'est évident, elle explose, il n'y a plus de miroir du tout… Voyons le résultat. Si le photon suit le chemin A vers B, vers la Bombe, elle explose, il est sûr que l'on va en gâcher une de temps en temps.

mzender5

Si le photon suit le chemin ACD ... et aboutit en "1", ce qui se vérifie à l'aide d'une photocellule, citée plus haut, on reste dans le doute... c'est ce qui se passe encore de temps en temps aussi. Mais rien n'interdit de recommencer (revoir la figure 1).

       Si le photon suit le chemin ACD et aboutit en "2", ALORS (alors alors!) on a réussi! La bombe est active, c'est une certitude, et elle le reste, puisqu'on ne l'a pas touchée. Le photon, sur la lame semi transparente D, n'a pas rencontré de photon virtuel, il a donc pu, sans interférence, se diriger en "2". Cela veut dire aussi que, "dans un autre monde" la bombe a explosé, arrêtant ainsi le photon virtuel... la bombe "virtuelle" explosée a joué le rôle du carton... De la bombe "réelle" disposée en B on sait maintenant qu'elle exploserait nécessairement si un photon parvenait dessus (ce qui ne s'est pas produit). Faut-il rappeler encore que la bombe "virtuelle", le photon "virtuel", sont aussi réels que les autres (les nôtres), mais existent dans d'autres mondes parallèles. La "superposition quantique" ne concerne pas seulement des particules isolées, mais des (exemplaires d') univers entiers.

On retient ceci: un événement qui aurait pu exister et ne l'a pas fait, ici l'explosion de la bombe, a des conséquences physiquement observables, ici, l'arrivée du photon en "2". Cette observation est effectivement possible... elle est une bonne indication de l'existence des "mondes parallèles", ou du "Multivers", tel que le proposait Hugh Everett, dès 1957...

Bien sûr, on fait l'expérience autrement qu'avec une bombe... mais la bombe, cela frappe mieux l'esprit. Reste l'essentiel:

Un événement qui aurait pu survenir, mais n'a pas eu lieu, peut avoir des conséquences physiques observables.


sources: jean dutertre

Les Univers parallèles

La réalité des paradoxes

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